samedi 30 novembre 2013

Sayonara 31 ou comment une brodeuse transforme...

Le chariot terrestre, les blaireaux avaient disparu. Madame Sato regarda quelque peu intimidée puis s'inclina profondément. C'était étrange bien sûr mais elle n'avait pas peur. S'incliner bien sûr mais il fallait peut-être dire...quelque chose :
- Bon...Bonjour ...Madame
- Bonjour ! Vous êtes sans doute un peu étonnée. Peut-être vous demandez-vous qui je suis ?
- Oui, si ce n'est pas trop indiscret.
- Je suis votre brodeuse !
Bien sûr pensa Madame Satô, c'était tout à fait logique ! Sa brodeuse, évidemment, il fallait bien qu'elle la rencontre un jour. Oserait-elle, elle osa :
- Et pourquoi ce bocal et ce poisson rouge ?
- Ho ! c'est simplement votre époux.
Mon époux, Monsieur Satô.
- Oui ! Monsieur Satô !
Madame Satô s'approcha, elle voulait voir de plus près, enfin oui, son époux...Elle ne comprenait pas très bien.

dimanche 24 novembre 2013

Sayonara 30

Madame Satô avait fait soigneusement sa toilette, s'était brossé les dents, avait revêtu une chemise de nuit neuve, elle s'allongea les bras le long du corps. Elle était bien. Légèrement flottante. Le saké. Elle rêva ou bien ce n'était pas un rêve, ou bien, si c'était un rêve : quelque chose de très sérieux. Il y avait un merveilleux char terrestre, elle se souvenait d'avoir vu un jour une reproduction mais il y avait très très longtemps et puis...son coeur battait très fort, il y avait là ses meilleurs amis les blaireaux : enfant à la campagne elle adorait les blaireaux mais il se cachaient, on les voyait rarement. Et ils étaient là bienveillants.
Elle était certaine qu'ils voulaient lui dire quelque chose, qu'elle allait peut-être enfin savoir...oui ce qu'elle désirait savoir depuis si longtemps au fond de son coeur et qu'elle n'avait osé raconté à personne.
Elle resta les yeux grands ouverts : non elle n'avait pas peur.

mercredi 20 novembre 2013

Sayonara 29

Le téléphone sonna, on l'attendait à la réception. Madame Satô bien reposée passa à la salle de bain, se regarda : oui elle s'aimait bien comme cela mais, elle sourit : Monsieur Satô la reconnaîtrait-il ?
L'ascenseur s'ouvrit, le jeune homme s'inclina :  il n'était pas seul. Une jeune femme l'accompagnait, sa fiancée peut-être, sa femme ou sa compagne ? Et elle était européenne. Il fit un pas : "Je vous présente Adèle, elle est française, nous nous sommes rencontrés à l'Institut Français où je voulais perfectionner mon français," il sourit timidement..."Et voilà". Madame Satô s'inclina, cette jeune femme avait l'air si sûre d'elle, comme cela devait être confortable, et le neveu de Monsieur Sakô était fort amoureux, pas besoin de mots pour le comprendre. Ils prirent un taxi, Adèle lui parla de son village, oui elle venait d'un petit village dans l'Est de la France, à l'école elle avait lu des livres sur le Japon et elle avait su que c'était là qu'elle devait aller, elle rougit - Madame Satô apprécia, cette jeune femme n'était pas sans réserve ni timidité - "Bien sûr j'ignorais que je rencontrerais l'homme que je vais épouser". Madame Satô lui effleura la main, Adèle sembla reconnaissante. Le restaurant avait été choisi avec soin : japonais mais il y avait des sièges pour s'asseoir ce qui était mieux pour elle et ses rhumatismes. Elle trouva que le tofu était bien meilleur qu'à Paris mais ce qui lui plut plus que tout furent les gâteaux à la pâte de haricots rouges. Et puis elle but, oui un peu de saké chaud, elle l'aimait chaud. Ils bavardaient, ils étaient heureux, elle regarda Adèle et Mon Dieu, tout à coup vit les invités peut-être indésirables, certainement ni le jeune homme ni la jeune femme ne les voyaient. Peut-être le saké... Il y avait le petit rat blanc,  un tremblement de terre ! et cette drôle de bête pas très jolie, un tengu sans doute qui pouvait être amical et puis les trois singes : "nous sommes discrets, soit le aussi, ils sont jeunes, qu'ils restent dans l'innocence du devenir". Madame Satô inclina la tête, ils la raccompagnèrent jusqu'à sa chambre, elle embrassa Adèle : elle avait décliné toute invitation pour le lendemain assurant qu'elle désirait se promener un peu dans la ville. Ils approuvèrent.
Elle, elle savait : C'ÉTAIT UN AUTRE VOYAGE QUI L'ATTENDAIT.

vendredi 15 novembre 2013

Soyanara 28

Madame Satô acheta des planchettes, pas toutes ! Voyons ce serait de la folie ! Elle repartit en marchant un peu plus lentement, et lorsqu'elle aperçut le banc, elle s'assit, il faisait doux, elle regarda sa montre : elle avait du temps.
Et tranquillement elle se laissa aller à une douce somnolence. Elle souriait, un petit garçon et une petite fille qui se tenaient par la main la désignèrent à leurs parents : "chut ! La dame est fatiguée, il ne faut pas se moquer, c'est une grand-mère".
Madame Satô était ...dans les étoiles, elle voyageait comme elle aimait : sans bouger ! Juste du rêve, au fond elle avait rêvé toute sa vie. Le lapin ! Elle se souvenait d'un lapin bicolore, dans un magasin au moment de Noël, il lui avait fait envie, il n'y avait pas très longtemps qu'elle était à Paris, peut-être...mais elle n'osa pas, cela n'allait pas avec sa condition de femme mariée, ce n'était pas raisonnable. Elle avait espéré qu'une petite fille l'aurait comme cadeau sous le sapin et le chérirait. Mais l'oiseau ! Vilain oiseau, que voulait-il ? Hum et la drôle de bête, voyons, voyons...Elle se réveilla en sursaut.
Assez de sottise, il lui fallait rentrer, s'habiller avant que le jeune homme ne vienne la chercher. Reposée, elle repartit d'un pas plus rapide.

lundi 11 novembre 2013

Sayonara 27 J'ai neuf ans !

Madame Satô se réveilla en sursaut : un bruit sans doute pourtant cet hôtel était bien calme, presque trop, le double vitrage ne permettait pas d'entendre la circulation comme chez elle et on n'entendait guère les pas ou les voix venant du couloir.
Oui cela doit être apprécié mais pour une personnage de mon âge, un peu de vie, cela fait du bien ! Je me suis donc assoupie !
Elle regarda sa montre, elle n'avait pas dormi tant que ça, il lui restait presque deux heures à attendre ! Elle se releva, s'habilla avec plaisir, comme c'était facile : un pantalon, ce joli pull et cette veste. Elle descendit jusqu'à la réception, elle avait déjà une sensation de familiarité comme si c'est hôtel était déjà un peu son chez soi mais ce n'est qu'une étape ! Ne l'oublie pas !
Une jeune femme si jolie qui semblait si...compétente lui sourit. Et bien voilà, elle avait un peu plus d'une heure - elle avait réfléchi : après son escapade il lui faudrait se reposer, elle devait faire honneur au neveu de Monsieur Sakô - et elle désirait un peu se promener, y avait-il un temple pas loin ? La jeune femme sourit :
- Quelle chance vous avez, vous allez sortir, c'est très facile à trouver, vous prenez à droite, et à la deuxième rue vous déboucherez sur un parc, il y a là un temple pas très grand mais agréable, et il y a des bancs pour se reposer un peu.
Madame Satô s'inclina :
- Je vous remercie.
Elle partit, traversant le hall tranquillement, il y avait de la circulation mais pas trop et le parc se trouvait bien au bout de la rue. Un joli parc, il faisait doux, la lumière était belle, elle déambula dans les allées, puis s'arrêta à une échoppe où étaient suspendus de drôles de petits animaux, les esprits de la forêt songea-t-elle, je suis dans une temple shintoïste.
Elle regarda avec ravissement, un loup, une merveilleuse chauve-souris et la lune, c'était comme des jouets d'enfants, enfant elle n'avait pas eu de jouets, elle s'approcha, ce n'était pas bien cher, elle allait acheter ces trois là mais d'autres encore ! Ce n'était pas raisonnable, elle n'en avait cure ! Elle avait neuf ans, quelque part des parents bienveillants visitaient le temple, ils lui avaient donné quelques pièces qu'elle allait s'empresser de dépenser. Elle chantonna : j'ai neuf ans ! Mon Dieu, on allait penser qu'elle était folle mais les quelques promeneurs ne semblèrent pas faire attention. Elle s'approcha encore un peu, pour mieux regarder les petites planches.





jeudi 7 novembre 2013

Sayonara 26

Le jeune homme ouvrit la porte, Madame Satô s'installa, bien sûr elle avait déjà pris des taxis mais elle sentait que c'était là une voiture plus luxueuse, elle sourit en pensant à Monsieur Sakô. Après un moment d'hésitation le jeune homme s'installa à ses côtés. Il lui demanda si le voyage n'avait pas été fatigant. Non, elle avait eu un vrai lit et avait pu dormir, elle ne parla pas de l'alcool qu'elle avait bu ! Ce n'était peut-être pas convenable. Il lui expliqua que l'aéroport était un peu loin de Tokyo, ils auraient pu prendre le train mais une voiture était peut-être plus confortable. Elle pensa qu'elle aurait aimé prendre un train, mais certainement il y aurait des occasions. Il se présenta, il était un neveu de Monsieur Sakô qui lui avait tout spécialement recommandé Madame Satô pendant tout le voyage qu'elle comptait faire. Mais il pensait que probablement, - il était déjà tard - qu'elle aimerait se reposer à l'hôtel. Ensuite il pourrait venir la chercher pour qu'ils puissent prendre un repas ensemble, il y avait de très bons restaurants et discuter de ce qu'elle désirait faire. Elle hocha la tête, hésita puis demanda s'il y avait des magasins près de l'hôtel. Il sourit : il y avait dans l'hôtel même de très bons magasins, et aussi coiffeur, esthéticienne, masseur. Elle rit :
- Quel plaisir ! L'esthéticienne je ne sais mais le coiffeur, un massage et des vêtements, oui...
- Je suis certain que vous trouverez ce qui vous conviendra dit-il après une légère hésitation.
Pensait-il qu'elle désirait s'acheter un kimono ?
L'hôtel se situait dans un parc, il  l'accompagna jusqu'à la réception puis jusque dans sa chambre, il y avait un kimono plié, des sandales, il ouvrit discrètement les toilettes et la salle de bain tout en vérifiant si tout était bien . Puis il s'inclina ! Si elle pensait se perdre, elle pourrait demander à la direction qu'on l'accompagne.
Elle remercia tout en songeant qu'elle était fort capable de se débrouiller, elle se sentait pleine d'énergie. Ils fixèrent l'heure du repas, cela lui laissait trois longues heures.
Sa valise allait arriver, elle posa son sac en tapisserie sur le lit. Alla aux toilettes, perplexe regarda tous les boutons sur le côté du WC et n'osa en utiliser aucun : elle demanderait à la femme de chambre. Dans ce genre d'hôtel il y avait certainement des femmes de chambre
Elle but une gorgée d'eau, et prit l'ascenseur. Il était tout près. A la réception, elle demanda où était la galerie commerciale, on lui indiqua, bien entendu elle n'avait même pas à sortir. Elle flâna, tâtant la pochette accrochée par une chaîne à son cou.
Elle entra d'abord dans un salon de coiffure, on se précipita, elle voulait, elle voulait qu'on lui coupe les cheveux : courts, bien courts. La jeune femme hocha la tête. On lui lava la tête, et le chignon tomba, elle ressentit comme une sorte de jubilation. La coiffeuse sécha les cheveux et coupa. Puis en se regarda : elle hocha la tête. C'était très bien merci. Elle paya et se retrouva dans la galerie un peu déroutée, elle savait qu'elle n'était plus tout à fait la même et elle ne savait pas encore si elle s'entendrait ou aimerait la nouvelle Madame Satô, en tout cas pensa-t-elle avec un humour, il est évident qu'elle serait morte avant que les cheveux n'aient repoussé.
Elle hésita entre plusieurs boutiques, puis entra, la vendeuse semblait un peu plus âgée que toutes les jeunes vendeuses et coiffeuses auxquelles elle avait eu à faire. C'était rassurant. Cette dame était exactement ce qu'il fallait, elle écouta, elle l'avait fait asseoir discrètement. Un pantalon, un pull et une veste, oui on pouvait trouver cela. Tout uni ? Madame Satô réfléchit : non elle voulait quelque chose d'amusant ! Mon Dieu ce n'était pas l'ancienne Madame Satô qui parlait mais la nouvelle, et puis après songea-t-elle bravement ! Elle essaya, ça prit du temps, elle se sentit fatiguée. Mais elle fut contente de son choix ! Elle avait pensé se faire masser mais elle n'avait plus qu'elle envie : regagner sa chambre. Elle fut fière de retrouver seule l'étage et la chambre. Elle enleva ses vêtements, revêtit le kimono et s'étendit. Oui Monsieur Satô, il y a bien longtemps, elle songea aux kimonos. IL N'Y AURAIT PLUS DE KIMONOS !

lundi 4 novembre 2013

Sayonara 25

L'hôtesse de l'air s'approcha doucement de Madame Satô, elle lui effleura  l'épaule : bientôt on allait atterrir, il fallait attacher sa ceinture et toutes ces sortes de choses. Madame Satô sourit. Avait-elle dormi si longtemps, sans doute mais cela avait été un sommeil étrange, il lui semblait que sa vie s'était un peu confondue avec une autre vie, mais pas trop, un peu. Légèrement. Et maintenant, il fallait se préparer, elle rentrait au pays, mais cela ne voulait rien dire. En réalité elle se sentait très...étrangère, dans l'avion elle était la seule en kimono ! Certes à Paris, il y avait peu de Japonaises en kimono, mais bien on était à Paris. Le temps ne s'était pas arrêté !
Elle boucla sa ceinture, attendit sagement. On vint l'aider à se lever, elle était quelque peu ankylosée ! Non elle tenait à porter son sac en tapisserie. Le voyage avait été long bien que fort confortable. Elle n'avait aucune crainte, Monsieur Sako lui avait promis que quelqu'un l'attendrait.
- Mais comment le reconnaîtrais-je ?
- Ne vous faites aucun souci, il vous reconnaîtra.
 Elle descendit bonne dernière, au pied de la passerelle, il y avait une voiture particulière, très belle et un jeune homme se tenait à côté, et lorsqu'il la vit : il s'inclina profondément. C'est alors qu'elle se promit de quitter le kimono à jamais.