C’était jour de marché, certainement elle ne ferait aucune course aujourd’hui, chat roux semblait avoir disparu, il ne devait pas être bien loin. Peut-être après tout…oui elle devait saluer son vieil ami qui tenait un étal de bijouterie ! Bijoux de pacotille, elle n'en portait pas, non ce qu’elle aimait c’était en acheter – surtout des pierres de toutes les couleurs – ensuite elle les mettait dans un coffret, elle en avait de toutes tailles, de tout bois, pas de plastique non jamais. Certains avec des clés minuscules et même des cadenas qu’il aurait été bien facile de forcer !
Elle s’avança dans l’allée centrale, il était là, hirsute, il ressemblait à un bon vieux chien tout gris, ils se parlaient peu, se souriaient, il ne vendait pas beaucoup, un jolie broche, des pierres violettes, il murmura « ancienne », elle hocha la tête. Elle n’y croyait pas mais faisait semblant, elle sortit l’argent de son porte-monnaies, compta les pièces, enfouit la broche entourée du papier de soie traditionnel, remercia, salua. Un grand cri ! Tiens chat roux lui non plus n’avait pas résisté, et le poissonnier lui courait après, il tournait au coin de la place, là où se trouvait la terrasse où elle avait vu Adrienne et Augustin.
Elle partit à petits pas, il l’attendait, caché derrière une poubelle, tu es un coquin toi ! Il fila droit devant elle, enfin filé, pour un chat de son espèce on aurait pu dire qu’il marchait à pattes comptées ! La rue des Carmes montait fort, elle prit appui sur la rambarde, il continuait, puis s’arrêta devant l’hôtel, le seul hôtel de cette rue, pourquoi elle ne le savait pas ! Allait-elle oser entrer ? Elle se décida, Adrienne l’attendait, debout bien droite, le chignon lissé, le sac en bandoulière, une toilette un peu vieillotte, elle ne devait pas avoir quarante ans ! Elle sourit, lui mit très légèrement la main sur l’épaule et la fit pivoter vers la sortie, murmurant :
- le réceptionniste adorable et aussi une réceptionniste délicieuse, je suis gâtée !
Madame
Satô murmura :
-Ils savent que….
-Non bien sûr !
Le trottoir n’était pas bien large, il était difficile de s’y
tenir à deux, chat roux semblait musarder, s’arrêtait lorsqu’il les distanciait
un peu trop ! Madame Satô était à vrai dire un peu éberluée. Certes !
Elle avait été témoin de l’accident, de comment dire…la mort d’Adrienne et de :
pouvait-on parler de résurrection, cela paraissait excessif ! Certainement
il s’agissait d’un fantôme, elle était persuadée de leur existence, Adrienne en
était une et le monsieur qui était avec elle, elle en avait la certitude sans
savoir d’où ça lui venait en était un aussi. Elle se demanda si Monsieur Satô était devenu un fantôme, en tout cas
il ne lui avait jamais rendu visite, peut-être par discrétion ou bien il s’était
réincarné…en papillon ! Un rire lui échappa. Adrienne sursauta, Madame Satô, confuse, mit
la main devant sa bouche, elle ne pouvait tout de même pas faire part de telles
pensées à Adrienne, elles se connaissaient à peine, c’était trop intime. La
montée avait été rude, elle lui proposa de s’arrêter à la terrasse de
cette boulangerie, il suffisait de descendre quelques marches ! Elle acquiesça,
elles commandèrent un café pour Adrienne, et un thé vert et un croissant aux
amandes pour Madame Satô gourmande comme une chatte. A propos de
chat, chat roux ronronna doucement, elle lui offrit quelques miettes !
Elle regardait Adrienne : c’était tout de même curieux qu’un fantôme
puisse se conduire exactement comme une personne normale, aller à l’hôtel,
boire un café. Et puis enfin pourquoi Chat roux ? Pourquoi ce désir de
rencontre même si ça lui était assez agréable, ça rompait la monotonie de oui
il fallait bien le dire de la vieillesse. Depuis quelque temps elle ruminait un
projet, elle n’en avait pas encore parlé à Marie, il lui faudrait pourtant son
aide. Adrienne regardait les pigeons, tranquille, toujours bien droite. Madame
Satô remarqua la légère estafilade, Adrienne croisant son regard : « Oui,
l’accident, Ils n’ont pas réussi à tout enlever ». Elle paya, elles remontèrent la rue des Écoles, chat
roux semblait leur avoir faussé compagnie.
Cluny, le musée Cluny ! Monsieur Katô lui avait proposé
un jour d’aller le visiter, elle avait refusé, elle n’aimait pas les musées,
elle ne savait pas pourquoi ! Et pourtant elles pénétrèrent dans la cour,
Adrienne paya les billets, elles montèrent, chat roux les précédait mais on ne semblait pas le remarquer. Elles arrivèrent dans la pièce, il n’y avait
personne, c’était miraculeux. Elle joignit les mains ! Elle vit les lapins
et le papillon qui s’évada de la tapisserie. Mon dieu comme c’était beau, elle
rougit de honte, comment avait-elle pu être aussi indifférente, aussi…elle s’inclina et
s’adressant à Adrienne : « Je vous remercie ».
"Ton histoire, j’adore les lièvres – la rencontre avec les tapisseries de Cluny – avance d’un pas sûr et lent – le temps est en suspens – c’est paisible et beau. Comment construis-tu? Tu sais déjà la destination du récit ou il apparaît à fur et à mesure?" Karen
RépondreSupprimerJe sais un peu...la destination du récit mais pas du tout ce qui va se passer avant que ça n'arrive et qui sait si la destination, elle-même ne changera pas !
Supprimer"J'ai tout lu. Quelle imagination ! On attend la suite avec impatience : c'est un peu comme les feuilletons qui paraissaient fractionnés dans les journaux avec le "A suivre" ! qui concluait.
RépondreSupprimerVu les lapins. JOOOOLIS !"
Merci "la dame discrète", oui : à suivre, il y avait ça aussi dans les journaux pour petites filles ! Et tout comme Madame Satô, j'adore les lapins ! Hélas demain c'est l'ouverture de la chasse !
Supprimer"As-tu osé voler deux lapins à Cluny?
RépondreSupprimerIl y a un OVNI sur la toile: lunette avec pupille? soutien-gorge? Les deux?" Sari
Oui je l'avoue,je les ai volés et mis à l'abri dans la maison (ouverture de la chasse oblige!)mais personne ne s'en est aperçu comme pour les fantômes qui se baladent tranquillement !
SupprimerBravo ! mais je dirais plutôt lunettes ! SEULEMENT VOILA LUNETTES DE QUI ???